« Je connais un super spot pas loin d’ici ! » Le spot, c’est cette chose qu’on ne partage qu’avec les gens proches. C’est le bon filon, l’endroit où la vague est un peu plus grande que sur les autres plages, le lieu où le coucher de soleil sera resplendissant tous les soirs, la clairière où votre van sera à l’abri des regards pour profiter d’une soirée de bivouac. Bref, le spot, c’est un lieu dont on chérit tous les avantages.

Eh bien l’électricité aussi possède son spot ! Sur ce marché, l’électricité était vendue en moyenne à 58 €/MWh en 2024. C’est 100 €/MWh de moins que sur les marchés à terme l’année précédente… pour la même électricité ! Le spot serait-il une garantie d’électricité moins chère et plus responsable ? Rien que pour vous, exceptionnellement, nous vous dévoilons les secrets de ce spot de l’électricité encore si bien caché.

Qu’est-ce que le marché spot de l’électricité ?

Définition du marché spot et de ses caractéristiques

Derrière le marché spot se trouve une place boursière, Epex spot, où se vend et s’achète l’électricité selon un prix fixé la veille pour le lendemain (marché day-ahead). Ce prix est déterminé sur un pas horaire. Par exemple, pour le lundi 5 mai, de 8 heures à 9 heures, il était de 35 €/MWh. À midi, il descendait à 18,12 €/MWh. Ensuite, de 16 heures à 18 heures, l’électricité coûtait 0 €/MWh avant de remonter à 28,1 €/MWh à 21 heures.

Le spot cache ainsi des disparités heure par heure mais aussi d’un mois à l’autre. La fourniture est souvent plus chère sur la fin de l’année (99,3 €/MWh pour la période novembre-décembre 2024) qu’en plein été.

Il y a donc une grande volatilité des prix sur le marché spot. Selon RTE, l’indice de volatilité des prix spot a d’ailleurs atteint 66 % en 2024. Entre 2004 et 2020, cet indice se situait plutôt dans une fourchette compris entre 20 et 36 % ! Pourquoi ?

Tous les jours, en fonction de la demande prévisionnelle (tenant compte de plusieurs facteurs comme la météo, les besoins industrielles, le jour de la semaine, etc.), chaque fournisseur cherche à remplir sa liste de course pour le lendemain. Avec le principe du merit order, il s’adresse à chaque centrale (via le marché) jusqu’à combler ses besoins. Lorsque la liste est terminée, le prix de l’ensemble est déterminé par la dernière centrale appelée. Ce prix peut alors bondir lorsque les coûts marginaux de cette centrale sont élevés, comme pour les centrales à gaz ou à charbon.

Le prix du spot est-il indexé sur le prix du gaz ?

C’est une accusation qui revient régulièrement. Par le principe du merit order, les centrales à gaz peuvent régulièrement servir de point d’ancrage pour le prix sur le marché spot. De nombreuses critiques du marché européen de l’électricité se font sur cette indexation indirecte au gaz, qui tire les prix vers le haut lorsque l’approvisionnement gazier est perturbé.

Pourtant, le gaz est de moins en moins déterminant. C’est un cas de figure désormais minoritaire, comme le souligne RTE dans son bilan électrique 2024. « Les prix spot français se sont situés très fréquemment en dessous du faisceau des coûts variables des centrales thermiques (71 % du temps). Il s’agit d’une évolution majeure par rapport à l’année 2023, où ce taux avait été de 48 %. »

Pour maintenir cela, alors qu’une électrification des usages est indispensable pour décarboner une grande partie de l’économie française et devrait booster la demande, la poursuite du déploiement des énergies renouvelables et décarbonées est donc nécessaire. Cela devrait par ailleurs contribuer à baisser le coût de l’électricité sur le marché spot et donc sur l’ensemble des marchés.

Quelle est la distinction entre marché spot, marché à terme et marché de détail ?

Car le marché spot n’est qu’une partie du marché de gros de l’électricité. Il est dédié au temps court et se distingue des autres par son rapport très direct aux coûts marginaux des centrales de production de l’électricité. Un autre marché permet d’équilibrer encore le réseau, sur un temps plus court encore : le marché intraday, avec des échanges le jour même toutes les 15 minutes.

Le marché de gros est complété par des marchés à terme, sur des échéances plus longues (jusqu’à cinq ans). Ces produits reflètent en partie des prévisions sur l’équilibre entre offre et demande au spot. Il est relativement sensible à d’autres facteurs, comme des prévisions économiques moroses qui viendraient tirer la demande vers le bas ou des risques sur l’approvisionnement électrique comme en cas de maintenances prolongées sur le parc nucléaire – comme en 2022 avec la crise des corrosions sous contrainte.

Enfin, le marché de détail s’adresse au consommateur final. Des fournisseurs y proposent des conditions tarifaires pour l’approvisionnement en électricité. Ils servent d’intermédiaires par rapport au marché de gros, en proposant différentes formules d’achat et des prix qui correspondent aux coûts qu’ils estiment nécessaires pour acheter cette électricité. Eux-mêmes adopteront différentes stratégies de couverture pour le besoin de leurs clients, en s’approvisionnant aussi bien sur le marché à terme qu’avec des ajustements sur le marché spot ou en s’assurant une production à long terme via des Power purchase agreement (PPA).

Mais concrètement, qui achète quoi sur le marché spot ?

Lorsque le 6 mai, à 18 heures, le coût de l’électricité était de 0,09 €/MWh et que la production est de 59 286 MW, cela ne signifie pas que tous ces mégawatts produits ont été vendus à 0,09 €/MWh. Une partie avait déjà été achetée sur les marchés à terme.

En fait, grâce au spot, le marché fait le point sur ce qu’il lui manque et ce qu’il a en trop. Si les fournisseurs ou les consommateurs ont déjà acheté l’équivalent de 40 000 MW sur le marché à terme, ils auront accès à la dentelle manquante pour le prix disponible au spot. De même, un fournisseur ou un acheteur qui aurait trop d’électricité dans son portefeuille pourra en revendre pour ce même prix, soit 0,09 €/MWh le 6 mai entre 18 heures et 19 heures.

En quoi le marché spot influence-t-il le prix payé par les consommateurs finaux ?

Le prix spot, c’est donc un « prix réel » de la production d’électricité qui équilibre les derniers échanges. Les marchés à terme anticipent ce prix définitif selon différents facteurs, en particulier un merit order prévisionnel pour le marché spot.

Ces marchés se préservent également des aléas qui pourraient mener à une explosion des coûts. Par conséquent, en 2022, alors que le recours aux centrales à gaz était très fréquent en France et que les prix du gaz avaient augmenté, les marchés à terme ont anticipé une situation qui perdurerait. Le produit calendaire pour 2023 a donc dépassé les 400 €/MWh, allant jusqu’à 1130 €/MWh fin août 2022. Mais finalement, cela correspondait aux pics du spot sur cette période, en pleine crise gazière avec la coupure de Nord Stream. Quelques mois plus tard, avec une production nucléaire et hydraulique nettement plus disponibles, la moyenne du spot en 2023 était inférieure à 100 €/MWh.

Les fournisseurs, qui achètent une partie de leur électricité sur ces marchés à terme et qui doivent se préserver d’une augmentation des coûts de fourniture, répercutent également ces augmentations dans leurs offres commerciales sous forme de prime de risque.

Le prix spot du gaz : comment ça marche ?

Le gaz a aussi un marché spot, qui possède quelques singularités par rapport à celui de l’électricité. En effet, le gaz peut être stocké. Son injection dans le réseau nécessite moins un équilibrage permanent.

Néanmoins, un prix spot du gaz est établi sur un pas journalier. Cela donne au marché un signal sur l’équilibre entre l’offre et la demande en pleine période de chauffe. Ce prix spot permet également de connaître le coût… du remplissage des stocks, lors de la période estivale.

De plus, contrairement à l’électricité, avec l’importation de gaz naturel liquéfié (GNL), les producteurs peuvent être situés à l’autre bout du monde. L’Europe achète du gaz à différents pays, de l’Algérie à l’Australie. Et le continent n’est pas le seul acheteur. Ce prix spot est donc sensible à la concurrence internationale, avec un rôle croissant de la demande asiatique (Chine, Inde, Pakistan…).

Comment les prix sont-ils fixés sur le marché spot ?

Fonctionnement de la bourse Epex spot

La bourse Epex spot est un marché européen. Il permet en fait d’harmoniser les flux entre les acteurs du continent et de maximiser le recours aux énergies peu coûteuses et moins polluantes.

En effet, le marché Epex spot joue un rôle pour inciter aux échanges commerciaux via les interconnexions électriques. La France peut par exemple fournir l’Allemagne en énergie nucléaire en début de journée, lorsque les centrales solaires s’éveillent encore, puis s’appuyer sur des importations depuis l’Espagne pour diminuer ses besoins en centrales thermiques en milieu de journée. Grâce au merit order, ce sont les énergies les moins chères et les moins carbonées qui sont prioritaires.

Quels facteurs influencent le prix horaire de l’électricité ?

Le prix horaire de l’électricité va donc dépendre de facteurs parallèles :

  • la demande prévisionnelle, qui varie beaucoup en France avec les besoins en chauffage électrique ;
  • la disponibilité des centrales, notamment nucléaires pour la France mais aussi hydroélectriques, afin de ne pas avoir recours aux centrales fossiles ;
  • les prévisions de production renouvelable en France ;
  • les capacités d’interconnexion avec les autres pays ;
  • ces mêmes facteurs dans les pays voisins interconnectés, comme l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne voire la Grande-Bretagne et bientôt l’Irlande.

Sur le marché spot, des journées de cotation qui ne se ressemblent pas

Compte tenu de ces différents facteurs, le marché spot est soumis à une certaine saisonnalité. Un pays thermosensible comme la France – avec un chauffage majoritairement électrique – connait un pic de consommation lorsque les températures extérieures baissent. Ainsi, en hiver, on constate des prix spot hauts avec des pics aux alentours de 8 heures puis de 18 heures, lorsque la consommation domestique est élevée.

Si un jour est signalé PP1-PP2 par RTE, les prix seront vraisemblablement d’autant plus élevés, le gestionnaire de réseau craignant un haut pic de consommation.

Sur cette semaine, RTE avait placé des signaux PP1-PP2 les 20, 21 et 22 janvier 2025.

Par ailleurs, l’émergence de l’énergie solaire change la donne pour les journées estivales, où la demande électrique est déjà plus faible – surtout si les climatiseurs sont encore rares. Une journée d’été ne ressemblera donc pas à une journée d’hiver. Les creux sont plus fréquents. En France, si la disponibilité des parcs nucléaires et hydrauliques est grande, le prix dépassera plus rarement les 50 €/MWh et s’aventurera parfois dans le négatif.

Lance Fertilisants réduit sa facture de 40 €/MWh grâce au suivi du marché !

En 2022-2023, Lance Fertilisants est confronté à la hausse brutale des coûts de l’énergie. Un poste de dépenses essentiel pour son activité, qui représente jusqu’à 25 % de ses coûts de production. Comment limiter l’inflation ?

Avec l’offre de gestion pilotée de Collectif Énergie, Lance Fertilisants a pu tirer profit du suivi des prix sur le marché spot et les marchés à terme. L’entreprise a minimisé son budget énergie en le sécurisant lorsque le contexte de marché était favorable, avec des baisses successives de 57,25 % puis 27,5 %. Ainsi, elle a pu couvrir ses besoins en plusieurs fois, lissant les prix et limitant le risque.

« Sans Collectif Énergie, nous aurions connu des coûts de production beaucoup plus importants par rapport aux années précédentes. Maintenant, nous sommes rassurés. »

Comment suivre les prix du marché spot au quotidien ?

Le marché spot envoie des signaux de hausse et de baisse aux marchés

Le marché spot n’est pas qu’une option d’achat sur un temps très court, que ce soit pour équilibrer votre approvisionnement en complétant des rubans de consommation précédent. Ce n’est pas qu’une dentelle d’ajustement. C’est également un thermomètre de l’état du réseau français et européen.

Son évolution permet de situer le niveau de l’offre et de la demande sur le continent. Pour les autres marchés de l’électricité, c’est donc un élément essentiel, un facteur influent. Il indique souvent si les prix risquent d’être revus à la hausse ou à la baisse dans les prochains jours et les prochains mois.

Des plateformes et outils de visualisation des prix spot en temps réel

Des solutions existent pour prendre connaissance de ces évolutions du marché spot au quotidien, à l’échelle de l’Europe.

Sur Futures, l’application de Collectif Énergie, vous aurez accès à un aperçu clair de l’évolution du marché. En un coup d’œil, vous pourrez voir si les prix sont orientés à la baisse et si cela pourrait être le moment de couvrir une partie de vos besoins.

Une plateforme de visualisation peut également être liée à votre consommation réelle. Ainsi, vous aurez connaissance de vos besoins sur le marché spot. Si vous choisissez d’évoluer vers une stratégie d’achat en bloc + spot, vous aurez besoin de cet outil pour garder la maîtrise de votre budget.

Ainsi, l’application Futures démocratise cette information pour que chacun puisse adopter une stratégie d’achat bien souvent réservée aux grands groupes, qui disposent eux d’experts et d’outils coûteux. Vous aurez accès à des prix compétitifs et directement liés à vos besoins réels.

L’achat en bloc + spot : devenir acteur de sa consommation d’électricité

Acheter au spot, c’est bien souvent revenir au plus proche du prix coûtant de l’électricité. Vous allez être au plus juste de la production qui correspond à votre consommation. Or, avec la suppression progressive des centrales fossiles dans le mix énergétique, le coût spot est de plus en plus volatil… et donc intéressant par rapport à des offres sur le marché de détail et des marchés à terme qui doivent se prémunir d’un éventuel appel au charbon et au gaz faisant gonfler les coûts. Il y a un risque à mesurer et à prendre à votre charge.

Or, si vous avez un prix fixe, vous n’aurez pas la mesure de ces moments d’électricité chère. À l’inverse, si votre formule d’achat comporte du spot, vous verrez ces prix… et pourrez choisir de décaler votre consommation. Vous allez agir. Vous devenez acteur de votre consommation.

Le spot, un outil pour miser sur l’électricité de demain : décarbonée, moins chère, flexible… et stockable !

Ainsi, le spot est votre allié lorsque vous avez déjà mis en place ou que vous souhaitez intégrer des moyens d’agir sur votre manière de consommer de l’énergie.

  • Dans un bureau, avec une GTB correctement installée et paramétrée conformément au décret Bacs, vous pourrez faire en sorte de réduire le coût de vos besoins en chauffage et en ventilation avec un pilotage de vos machines sur les périodes propices.
  • Dans une industrie, certains process peuvent tirer parti du stockage d’eau chaude ou de l’inertie des machines pour être plus actifs lorsque les prix sont faibles.
  • Dans une boulangerie, vos horaires atypiques s’adaptent au spot avec une consommation décalée par rapport aux pics de prix.
  • Dans un camping, avec une activité saisonnière en plein cœur de la production photovoltaïque, le spot a l’avantage de réduire encore la moyenne du spot et d’aller sur des formules d’achat encore moins élevées qu’avec une formule fixe sur toute l’année.
  • Etc.

Enfin, le spot va de pair avec la question de la transition énergétique. Il traduit, de fait, la décarbonation de l’électricité. En y ajoutant les solutions de demain, de la flexibilité de consommation au stockage d’énergie – via des batteries ou grâce à un parc de voitures électriques dit V2G (vehicle to grid) reposant sur des recharges bidirectionnels –, le spot vous permet de prendre totalement le contrôle sur vos dépenses énergétiques. Surtout si vous avez un bon pilote.

Article rédigé par Côme Tessier

Rédacteur web pour Collectif Énergie, je m’évertue à glisser des touches sportives ou des notes sucrées pour rendre plus accessibles les sujets liés à l’énergie. Sans jamais oublier de traquer les doubles espaces qui perturbent la lecture.

« Je connais un super spot pas loin d’ici ! » Le spot, c’est cette chose qu’on ne partage qu’avec les gens proches. C’est le bon filon, l’endroit où la vague est un peu plus grande que sur les autres plages, le lieu où le coucher de soleil sera resplendissant tous les soirs, la clairière où votre van sera à l’abri des regards pour profiter d’une soirée de bivouac. Bref, le spot, c’est un lieu dont on chérit tous les avantages.

Eh bien l’électricité aussi possède son spot ! Sur ce marché, l’électricité était vendue en moyenne à 58 €/MWh en 2024. C’est 100 €/MWh de moins que sur les marchés à terme l’année précédente… pour la même électricité ! Le spot serait-il une garantie d’électricité moins chère et plus responsable ? Rien que pour vous, exceptionnellement, nous vous dévoilons les secrets de ce spot de l’électricité encore si bien caché.

Qu’est-ce que le marché spot de l’électricité ?

Définition du marché spot et de ses caractéristiques

Derrière le marché spot se trouve une place boursière, Epex spot, où se vend et s’achète l’électricité selon un prix fixé la veille pour le lendemain (marché day-ahead). Ce prix est déterminé sur un pas horaire. Par exemple, pour le lundi 5 mai, de 8 heures à 9 heures, il était de 35 €/MWh. À midi, il descendait à 18,12 €/MWh. Ensuite, de 16 heures à 18 heures, l’électricité coûtait 0 €/MWh avant de remonter à 28,1 €/MWh à 21 heures.

Le spot cache ainsi des disparités heure par heure mais aussi d’un mois à l’autre. La fourniture est souvent plus chère sur la fin de l’année (99,3 €/MWh pour la période novembre-décembre 2024) qu’en plein été.

Il y a donc une grande volatilité des prix sur le marché spot. Selon RTE, l’indice de volatilité des prix spot a d’ailleurs atteint 66 % en 2024. Entre 2004 et 2020, cet indice se situait plutôt dans une fourchette compris entre 20 et 36 % ! Pourquoi ?

Tous les jours, en fonction de la demande prévisionnelle (tenant compte de plusieurs facteurs comme la météo, les besoins industrielles, le jour de la semaine, etc.), chaque fournisseur cherche à remplir sa liste de course pour le lendemain. Avec le principe du merit order, il s’adresse à chaque centrale (via le marché) jusqu’à combler ses besoins. Lorsque la liste est terminée, le prix de l’ensemble est déterminé par la dernière centrale appelée. Ce prix peut alors bondir lorsque les coûts marginaux de cette centrale sont élevés, comme pour les centrales à gaz ou à charbon.

Le prix du spot est-il indexé sur le prix du gaz ?

C’est une accusation qui revient régulièrement. Par le principe du merit order, les centrales à gaz peuvent régulièrement servir de point d’ancrage pour le prix sur le marché spot. De nombreuses critiques du marché européen de l’électricité se font sur cette indexation indirecte au gaz, qui tire les prix vers le haut lorsque l’approvisionnement gazier est perturbé.

Pourtant, le gaz est de moins en moins déterminant. C’est un cas de figure désormais minoritaire, comme le souligne RTE dans son bilan électrique 2024. « Les prix spot français se sont situés très fréquemment en dessous du faisceau des coûts variables des centrales thermiques (71 % du temps). Il s’agit d’une évolution majeure par rapport à l’année 2023, où ce taux avait été de 48 %. »

Pour maintenir cela, alors qu’une électrification des usages est indispensable pour décarboner une grande partie de l’économie française et devrait booster la demande, la poursuite du déploiement des énergies renouvelables et décarbonées est donc nécessaire. Cela devrait par ailleurs contribuer à baisser le coût de l’électricité sur le marché spot et donc sur l’ensemble des marchés.

Quelle est la distinction entre marché spot, marché à terme et marché de détail ?

Car le marché spot n’est qu’une partie du marché de gros de l’électricité. Il est dédié au temps court et se distingue des autres par son rapport très direct aux coûts marginaux des centrales de production de l’électricité. Un autre marché permet d’équilibrer encore le réseau, sur un temps plus court encore : le marché intraday, avec des échanges le jour même toutes les 15 minutes.

Le marché de gros est complété par des marchés à terme, sur des échéances plus longues (jusqu’à cinq ans). Ces produits reflètent en partie des prévisions sur l’équilibre entre offre et demande au spot. Il est relativement sensible à d’autres facteurs, comme des prévisions économiques moroses qui viendraient tirer la demande vers le bas ou des risques sur l’approvisionnement électrique comme en cas de maintenances prolongées sur le parc nucléaire – comme en 2022 avec la crise des corrosions sous contrainte.

Enfin, le marché de détail s’adresse au consommateur final. Des fournisseurs y proposent des conditions tarifaires pour l’approvisionnement en électricité. Ils servent d’intermédiaires par rapport au marché de gros, en proposant différentes formules d’achat et des prix qui correspondent aux coûts qu’ils estiment nécessaires pour acheter cette électricité. Eux-mêmes adopteront différentes stratégies de couverture pour le besoin de leurs clients, en s’approvisionnant aussi bien sur le marché à terme qu’avec des ajustements sur le marché spot ou en s’assurant une production à long terme via des Power purchase agreement (PPA).

Mais concrètement, qui achète quoi sur le marché spot ?

Lorsque le 6 mai, à 18 heures, le coût de l’électricité était de 0,09 €/MWh et que la production est de 59 286 MW, cela ne signifie pas que tous ces mégawatts produits ont été vendus à 0,09 €/MWh. Une partie avait déjà été achetée sur les marchés à terme.

En fait, grâce au spot, le marché fait le point sur ce qu’il lui manque et ce qu’il a en trop. Si les fournisseurs ou les consommateurs ont déjà acheté l’équivalent de 40 000 MW sur le marché à terme, ils auront accès à la dentelle manquante pour le prix disponible au spot. De même, un fournisseur ou un acheteur qui aurait trop d’électricité dans son portefeuille pourra en revendre pour ce même prix, soit 0,09 €/MWh le 6 mai entre 18 heures et 19 heures.

En quoi le marché spot influence-t-il le prix payé par les consommateurs finaux ?

Le prix spot, c’est donc un « prix réel » de la production d’électricité qui équilibre les derniers échanges. Les marchés à terme anticipent ce prix définitif selon différents facteurs, en particulier un merit order prévisionnel pour le marché spot.

Ces marchés se préservent également des aléas qui pourraient mener à une explosion des coûts. Par conséquent, en 2022, alors que le recours aux centrales à gaz était très fréquent en France et que les prix du gaz avaient augmenté, les marchés à terme ont anticipé une situation qui perdurerait. Le produit calendaire pour 2023 a donc dépassé les 400 €/MWh, allant jusqu’à 1130 €/MWh fin août 2022. Mais finalement, cela correspondait aux pics du spot sur cette période, en pleine crise gazière avec la coupure de Nord Stream. Quelques mois plus tard, avec une production nucléaire et hydraulique nettement plus disponibles, la moyenne du spot en 2023 était inférieure à 100 €/MWh.

Les fournisseurs, qui achètent une partie de leur électricité sur ces marchés à terme et qui doivent se préserver d’une augmentation des coûts de fourniture, répercutent également ces augmentations dans leurs offres commerciales sous forme de prime de risque.

Le prix spot du gaz : comment ça marche ?

Le gaz a aussi un marché spot, qui possède quelques singularités par rapport à celui de l’électricité. En effet, le gaz peut être stocké. Son injection dans le réseau nécessite moins un équilibrage permanent.

Néanmoins, un prix spot du gaz est établi sur un pas journalier. Cela donne au marché un signal sur l’équilibre entre l’offre et la demande en pleine période de chauffe. Ce prix spot permet également de connaître le coût… du remplissage des stocks, lors de la période estivale.

De plus, contrairement à l’électricité, avec l’importation de gaz naturel liquéfié (GNL), les producteurs peuvent être situés à l’autre bout du monde. L’Europe achète du gaz à différents pays, de l’Algérie à l’Australie. Et le continent n’est pas le seul acheteur. Ce prix spot est donc sensible à la concurrence internationale, avec un rôle croissant de la demande asiatique (Chine, Inde, Pakistan…).

Comment les prix sont-ils fixés sur le marché spot ?

Fonctionnement de la bourse Epex spot

La bourse Epex spot est un marché européen. Il permet en fait d’harmoniser les flux entre les acteurs du continent et de maximiser le recours aux énergies peu coûteuses et moins polluantes.

En effet, le marché Epex spot joue un rôle pour inciter aux échanges commerciaux via les interconnexions électriques. La France peut par exemple fournir l’Allemagne en énergie nucléaire en début de journée, lorsque les centrales solaires s’éveillent encore, puis s’appuyer sur des importations depuis l’Espagne pour diminuer ses besoins en centrales thermiques en milieu de journée. Grâce au merit order, ce sont les énergies les moins chères et les moins carbonées qui sont prioritaires.

Quels facteurs influencent le prix horaire de l’électricité ?

Le prix horaire de l’électricité va donc dépendre de facteurs parallèles :

  • la demande prévisionnelle, qui varie beaucoup en France avec les besoins en chauffage électrique ;
  • la disponibilité des centrales, notamment nucléaires pour la France mais aussi hydroélectriques, afin de ne pas avoir recours aux centrales fossiles ;
  • les prévisions de production renouvelable en France ;
  • les capacités d’interconnexion avec les autres pays ;
  • ces mêmes facteurs dans les pays voisins interconnectés, comme l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne voire la Grande-Bretagne et bientôt l’Irlande.

Sur le marché spot, des journées de cotation qui ne se ressemblent pas

Compte tenu de ces différents facteurs, le marché spot est soumis à une certaine saisonnalité. Un pays thermosensible comme la France – avec un chauffage majoritairement électrique – connait un pic de consommation lorsque les températures extérieures baissent. Ainsi, en hiver, on constate des prix spot hauts avec des pics aux alentours de 8 heures puis de 18 heures, lorsque la consommation domestique est élevée.

Si un jour est signalé PP1-PP2 par RTE, les prix seront vraisemblablement d’autant plus élevés, le gestionnaire de réseau craignant un haut pic de consommation.

Sur cette semaine, RTE avait placé des signaux PP1-PP2 les 20, 21 et 22 janvier 2025.

Par ailleurs, l’émergence de l’énergie solaire change la donne pour les journées estivales, où la demande électrique est déjà plus faible – surtout si les climatiseurs sont encore rares. Une journée d’été ne ressemblera donc pas à une journée d’hiver. Les creux sont plus fréquents. En France, si la disponibilité des parcs nucléaires et hydrauliques est grande, le prix dépassera plus rarement les 50 €/MWh et s’aventurera parfois dans le négatif.

Lance Fertilisants réduit sa facture de 40 €/MWh grâce au suivi du marché !

En 2022-2023, Lance Fertilisants est confronté à la hausse brutale des coûts de l’énergie. Un poste de dépenses essentiel pour son activité, qui représente jusqu’à 25 % de ses coûts de production. Comment limiter l’inflation ?

Avec l’offre de gestion pilotée de Collectif Énergie, Lance Fertilisants a pu tirer profit du suivi des prix sur le marché spot et les marchés à terme. L’entreprise a minimisé son budget énergie en le sécurisant lorsque le contexte de marché était favorable, avec des baisses successives de 57,25 % puis 27,5 %. Ainsi, elle a pu couvrir ses besoins en plusieurs fois, lissant les prix et limitant le risque.

« Sans Collectif Énergie, nous aurions connu des coûts de production beaucoup plus importants par rapport aux années précédentes. Maintenant, nous sommes rassurés. »

Comment suivre les prix du marché spot au quotidien ?

Le marché spot envoie des signaux de hausse et de baisse aux marchés

Le marché spot n’est pas qu’une option d’achat sur un temps très court, que ce soit pour équilibrer votre approvisionnement en complétant des rubans de consommation précédent. Ce n’est pas qu’une dentelle d’ajustement. C’est également un thermomètre de l’état du réseau français et européen.

Son évolution permet de situer le niveau de l’offre et de la demande sur le continent. Pour les autres marchés de l’électricité, c’est donc un élément essentiel, un facteur influent. Il indique souvent si les prix risquent d’être revus à la hausse ou à la baisse dans les prochains jours et les prochains mois.

Des plateformes et outils de visualisation des prix spot en temps réel

Des solutions existent pour prendre connaissance de ces évolutions du marché spot au quotidien, à l’échelle de l’Europe.

Sur Futures, l’application de Collectif Énergie, vous aurez accès à un aperçu clair de l’évolution du marché. En un coup d’œil, vous pourrez voir si les prix sont orientés à la baisse et si cela pourrait être le moment de couvrir une partie de vos besoins.

Une plateforme de visualisation peut également être liée à votre consommation réelle. Ainsi, vous aurez connaissance de vos besoins sur le marché spot. Si vous choisissez d’évoluer vers une stratégie d’achat en bloc + spot, vous aurez besoin de cet outil pour garder la maîtrise de votre budget.

Ainsi, l’application Futures démocratise cette information pour que chacun puisse adopter une stratégie d’achat bien souvent réservée aux grands groupes, qui disposent eux d’experts et d’outils coûteux. Vous aurez accès à des prix compétitifs et directement liés à vos besoins réels.

L’achat en bloc + spot : devenir acteur de sa consommation d’électricité

Acheter au spot, c’est bien souvent revenir au plus proche du prix coûtant de l’électricité. Vous allez être au plus juste de la production qui correspond à votre consommation. Or, avec la suppression progressive des centrales fossiles dans le mix énergétique, le coût spot est de plus en plus volatil… et donc intéressant par rapport à des offres sur le marché de détail et des marchés à terme qui doivent se prémunir d’un éventuel appel au charbon et au gaz faisant gonfler les coûts. Il y a un risque à mesurer et à prendre à votre charge.

Or, si vous avez un prix fixe, vous n’aurez pas la mesure de ces moments d’électricité chère. À l’inverse, si votre formule d’achat comporte du spot, vous verrez ces prix… et pourrez choisir de décaler votre consommation. Vous allez agir. Vous devenez acteur de votre consommation.

Le spot, un outil pour miser sur l’électricité de demain : décarbonée, moins chère, flexible… et stockable !

Ainsi, le spot est votre allié lorsque vous avez déjà mis en place ou que vous souhaitez intégrer des moyens d’agir sur votre manière de consommer de l’énergie.

  • Dans un bureau, avec une GTB correctement installée et paramétrée conformément au décret Bacs, vous pourrez faire en sorte de réduire le coût de vos besoins en chauffage et en ventilation avec un pilotage de vos machines sur les périodes propices.
  • Dans une industrie, certains process peuvent tirer parti du stockage d’eau chaude ou de l’inertie des machines pour être plus actifs lorsque les prix sont faibles.
  • Dans une boulangerie, vos horaires atypiques s’adaptent au spot avec une consommation décalée par rapport aux pics de prix.
  • Dans un camping, avec une activité saisonnière en plein cœur de la production photovoltaïque, le spot a l’avantage de réduire encore la moyenne du spot et d’aller sur des formules d’achat encore moins élevées qu’avec une formule fixe sur toute l’année.
  • Etc.

Enfin, le spot va de pair avec la question de la transition énergétique. Il traduit, de fait, la décarbonation de l’électricité. En y ajoutant les solutions de demain, de la flexibilité de consommation au stockage d’énergie – via des batteries ou grâce à un parc de voitures électriques dit V2G (vehicle to grid) reposant sur des recharges bidirectionnels –, le spot vous permet de prendre totalement le contrôle sur vos dépenses énergétiques. Surtout si vous avez un bon pilote.

Article rédigé par Côme Tessier

Rédacteur web pour Collectif Énergie, je m’évertue à glisser des touches sportives ou des notes sucrées pour rendre plus accessibles les sujets liés à l’énergie. Sans jamais oublier de traquer les doubles espaces qui perturbent la lecture.

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