Le nucléaire français se retrouve depuis quelques années dans une période de défis pour défendre sa durabilité ainsi que son modèle économique. Les projets de nouveaux EPR font face à une incertitude quant à leur compétitivité par rapport aux énergies renouvelables, avec un prix généralement évalué aux alentours de 100 €/MWh.

La solution passera-t-elle alors par la prolongation de la durée de vie des centrales actuelles ? Dans son dernier rapport, la Cour des comptes juge rentables les opérations de maintenance nécessaires pour conserver les réacteurs jusqu’à 60 ans… sous réserve d’une meilleure maîtrise de la part d’EDF. Selon les dernières estimations, cela engendrerait un coût de production du nucléaire historique aux alentours de 51 €/MWh.

Une maintenance rentable mais qui flambe à 6 milliards d’euros par an

Dans son rapport, la Cour des comptes a évalué la hausse des investissements consacrés à la prolongation des réacteurs existants. Ils auraient augmenté de 28 % par rapport à la période 2006-2014, pour atteindre plus de 6 milliards d’euros. Cette inflation devrait se poursuivre dans le cadre du « grand carénage » nécessaire pour assurer la sécurité et le maintien en service des 57 tranches existantes, avec des normes de sécurité de plus en plus contraignantes.

En tenant compte de la masse salariale et du calendrier à tenir, les hauts magistrats obtiennent un total de 130 milliards d’euros sur la période 2014-2035. Néanmoins, cette « maintenance des centrales et la poursuite de leur exploitation jusqu’à 60 ans, voire au-delà, […] paraissent rentables pour l’exploitant » et pourrait contenir une hausse des prix pour les consommateurs.

La crise de 2022 et la crainte des arrêts prolongés

De plus, la Cour des comptes juge que ce montant dépendra des capacités d’EDF à mener de front l’ensemble des opérations nécessaires sans nuire à la production. En effet, l’épisode compliqué de la corrosion sous contrainte, en 2022, a fait craindre une multiplication des difficultés pour le parc nucléaire français dans ses objectifs de production.

En 2022, près de la moitié des réacteurs avaient été mis à l’arrêt, en pleine flambée des prix du gaz. La production nucléaire avait alors atteint un point bas historique, à 279 TWh seulement. Pour les années à venir et jusqu’en 2030, EDF anticipe désormais une production qui se stabiliserait à 360 TWh environ.

Or, la haute magistrature note « la persistance de difficultés structurelles » pour EDF, avec des arrêts pour maintenance qui tendent à se prolonger de plus en plus. Elle appelle donc l’énergéticien à maintenir son programme de « maîtrise des coûts et délais », d’autant que la prolongation des réacteurs répond désormais à un impératif de décarbonation.

Limiter l’effet falaise : prolonger les réacteurs actuels et anticiper les nouveaux

En effet, le parc nucléaire français est confronté plus globalement à un problème de taille : la majorité des réacteurs ont été construits sur un temps très court, au milieu des années 80. Or, sans prolongation de leur durée de vie au-delà des 40 ans, potentiellement jusqu’à un maximum des 60, la capacité de production d’électricité en France risque de s’effondrer. Cela irait jusqu’à remettre en cause les objectifs d’électrification des usages et de décarbonation de notre économie, alors que l’atteinte de la neutralité carbone dès 2050 reste un objectif majeur pour limiter le réchauffement climatique.

Par conséquent, la prolongation des centrales apparaît aujourd’hui comme la réponse indépassable pour maintenir des coûts de production de l’électricité bas et stables en France, mais aussi pour garantir l’approvisionnement électrique du pays avant la mise en service des nouveaux réacteurs EPR à partir de 2040.

Source : La Tribune

Article rédigé par Côme Tessier

Rédacteur web pour Collectif Énergie, je m’évertue à glisser des touches sportives ou des notes sucrées pour rendre plus accessibles les sujets liés à l’énergie. Sans jamais oublier de traquer les doubles espaces qui perturbent la lecture.

Le nucléaire français se retrouve depuis quelques années dans une période de défis pour défendre sa durabilité ainsi que son modèle économique. Les projets de nouveaux EPR font face à une incertitude quant à leur compétitivité par rapport aux énergies renouvelables, avec un prix généralement évalué aux alentours de 100 €/MWh.

La solution passera-t-elle alors par la prolongation de la durée de vie des centrales actuelles ? Dans son dernier rapport, la Cour des comptes juge rentables les opérations de maintenance nécessaires pour conserver les réacteurs jusqu’à 60 ans… sous réserve d’une meilleure maîtrise de la part d’EDF. Selon les dernières estimations, cela engendrerait un coût de production du nucléaire historique aux alentours de 51 €/MWh.

Une maintenance rentable mais qui flambe à 6 milliards d’euros par an

Dans son rapport, la Cour des comptes a évalué la hausse des investissements consacrés à la prolongation des réacteurs existants. Ils auraient augmenté de 28 % par rapport à la période 2006-2014, pour atteindre plus de 6 milliards d’euros. Cette inflation devrait se poursuivre dans le cadre du « grand carénage » nécessaire pour assurer la sécurité et le maintien en service des 57 tranches existantes, avec des normes de sécurité de plus en plus contraignantes.

En tenant compte de la masse salariale et du calendrier à tenir, les hauts magistrats obtiennent un total de 130 milliards d’euros sur la période 2014-2035. Néanmoins, cette « maintenance des centrales et la poursuite de leur exploitation jusqu’à 60 ans, voire au-delà, […] paraissent rentables pour l’exploitant » et pourrait contenir une hausse des prix pour les consommateurs.

La crise de 2022 et la crainte des arrêts prolongés

De plus, la Cour des comptes juge que ce montant dépendra des capacités d’EDF à mener de front l’ensemble des opérations nécessaires sans nuire à la production. En effet, l’épisode compliqué de la corrosion sous contrainte, en 2022, a fait craindre une multiplication des difficultés pour le parc nucléaire français dans ses objectifs de production.

En 2022, près de la moitié des réacteurs avaient été mis à l’arrêt, en pleine flambée des prix du gaz. La production nucléaire avait alors atteint un point bas historique, à 279 TWh seulement. Pour les années à venir et jusqu’en 2030, EDF anticipe désormais une production qui se stabiliserait à 360 TWh environ.

Or, la haute magistrature note « la persistance de difficultés structurelles » pour EDF, avec des arrêts pour maintenance qui tendent à se prolonger de plus en plus. Elle appelle donc l’énergéticien à maintenir son programme de « maîtrise des coûts et délais », d’autant que la prolongation des réacteurs répond désormais à un impératif de décarbonation.

Limiter l’effet falaise : prolonger les réacteurs actuels et anticiper les nouveaux

En effet, le parc nucléaire français est confronté plus globalement à un problème de taille : la majorité des réacteurs ont été construits sur un temps très court, au milieu des années 80. Or, sans prolongation de leur durée de vie au-delà des 40 ans, potentiellement jusqu’à un maximum des 60, la capacité de production d’électricité en France risque de s’effondrer. Cela irait jusqu’à remettre en cause les objectifs d’électrification des usages et de décarbonation de notre économie, alors que l’atteinte de la neutralité carbone dès 2050 reste un objectif majeur pour limiter le réchauffement climatique.

Par conséquent, la prolongation des centrales apparaît aujourd’hui comme la réponse indépassable pour maintenir des coûts de production de l’électricité bas et stables en France, mais aussi pour garantir l’approvisionnement électrique du pays avant la mise en service des nouveaux réacteurs EPR à partir de 2040.

Source : La Tribune

Article rédigé par Côme Tessier

Rédacteur web pour Collectif Énergie, je m’évertue à glisser des touches sportives ou des notes sucrées pour rendre plus accessibles les sujets liés à l’énergie. Sans jamais oublier de traquer les doubles espaces qui perturbent la lecture.

Publications dans la même catégorie

  • Record d’émissions carbone en 2025 : l’objectif climatique de 1,5°C devient inaccessible

  • Flamanville 3 accélère sa montée en charge : le palier des 80% franchi, cap sur la pleine puissance

  • Note de marché du 28 octobre

  • Record d’émissions carbone en 2025 : l’objectif climatique de 1,5°C devient inaccessible

  • Flamanville 3 accélère sa montée en charge : le palier des 80% franchi, cap sur la pleine puissance

  • Note de marché du 28 octobre